Romain Puértolas, Comment j'ai retrouvé Xavier Dupont de Ligonnès (2024)

Une fois encore, et jusqu’à la dernière page, Romain Puértolas sait mener sa barque. Après Les Ravissantes, sorti en 2022, et ses premiers romans aux longs titres, le romancier propose une contre-enquête – ou plutôt un « roman-quête », comme il l’appelle – consacrée au tueur de Nantes Xavier Dupont de Ligonnès. Tout part d’une expérience vécue par l’auteur en 2019 quand, de l’autre côté du muret de sa villa en Espagne, il reconnaît, dans les traits d’un homme en peignoir blanc buvant son café, le criminel le plus recherché de France. Pour l’écrivain, ce mystérieux voisinage a tout du point de départ d’un roman, qui commence à la cour d’assises de Toulouse. Romain Puértolas y est accusé d’avoir tué Xavier Dupont de Ligonnès avec un couteau à beurre planté dans le visage à 94 reprises, après avoir eu lui-même la tête plongée dans sa friteuse. Tout cela a eu lieu quelques semaines plus tôt, à La Bastide-de-Bousignac, un coin perdu de l’Ariège où l’écrivain, après avoir rompu avec sa femme – partie avec David Foenkinos ! –, s’est installé dans le but de ne plus fréquenter le monde. Quelle surprise de voir, un jour, de l’autre côté de son jardin, Xavier Dupont de Ligonnès lisant le journal en prenant son café ! Le sang de l’ancien policier devenu écrivain à succès ne fait qu’un tour. Mais que faire, après des années d’enquêtes infructueuses, pour arrêter le fugitif ? Puértolas se souvient de l’été 2011 où, jeune lieutenant de police, il avait élaboré ses propres théories. Il sait tout de l’affaire, ses impasses comme ses manquements. Le livre alterne entre les scènes au tribunal où se déroule son procès pour meurtre, les pages de l’enquête, le temps présent à Bousignac et le roman qui, quand l’enquête piétine, explore les pistes inabouties. On retrouve ainsi Dupont de Ligonnès dans le Sud de la France, en Italie, au Mexique, au Texas et à Phuket. Le roman, s’il ne se prend d’abord pas au sérieux, l’auteur multipliant les facéties, ironisant sur les excès de la présomption d’innocence ou satirisant une police pas très active ni très maline…, devient une quête prenante et passionnante, qui se lit avec facilité tant le romancier sait nous balader d’une piste à l’autre avec aplomb, et entretenir la tension jusqu’au bout. SM