Bientôt les vivants, Amina Damerdji (2024)

Bientôt les vivants est le deuxième roman d'Amina Damerdji. Il nous plonge dans l'Algérie des années 90, où les activistes du FIS tentent de prendre le pouvoir en terrorisant la population par des attentats, tandis que le gouvernement déploie sa force militaire. Les Algériens subissent de plein fouet ces changements et sont menacés chaque jour par la violence des fous d'Allah. Pour raconter cette période, l'auteur nous invite au sein de la famille de Selma, une jeune fille habitant dans une grande maison occupée par ses parents, sa grand-mère et son oncle, Hicham. Ce dernier s'est fait enrôler dans les rangs islamistes.
Selma a une passion : monter à cheval. Au club d'équitation, elle s'attache à un étalon indocile, que les autres maltraitent et ont surnommé Sheïtane, comme le diable. Elle l'apprivoise et a pour but de le sauver de l'équarrissage. Sur une décennie, on voit évoluer cette jeune fille attachante, dont la vie va être contrariée par un grave accident, mais aussi par la découverte que n'importe qui autour d'elle peut rejoindre les rangs des égorgeurs.


Le roman se lit avec beaucoup de plaisir. La narration est limpide, la jeune Selma attachante. Son lien très fort avec Sheïtane touche le lecteur, qui a peur autant qu'elle de voir la bête revêche se faire tuer. À cette peur intime s'ajoute celle qui pèse sur un pays tout entier, en pleine transformation, pris entre deux violences. Beaucoup d'Algériens qui en ont les moyens décident de fuir à l'étranger, en particulier en France. Choisir une famille algérienne comme celle de Selma pour raconter l'Algérie fait penser par moments  à la trilogie du Caire de Naguib Mahfouz, qui a su raconter aussi les transformations de l'Égypte et la montée de l'islamisme à travers l'évolution des membres d'une famille. Corruption, violence accompagnent les désirs les plus simples de réussir sa vie pour des jeunes filles somme Selma ou sa cousine Maya, témoin de premier plan des bouleversements du pays par son rôle de journaliste en devenir. Ce roman est aussi une façon de parler de la folie islamiste, loin de s'être tarie depuis...

CM