Ce que Majella n'aimait pas, Michelle Gallen (2023)
Mar 27 Déc - 8:39
Majella vit dans la ville (inventée) d'Aghybogey, en Irlande du Nord. Elle a une vingtaine d'années, travaille six jours sur sept au Fish'and chips pour s'offrir un verre au pub, le dimanche soir. Son univers se réduit à sa chambre d'enfant, où elle se réfugie pour regarder en boucle des épisodes de Dallas parce qu'elle habite chez sa mère, qui passe son temps à boire sur le canapé depuis la disparition de son mari.
L'existence de Majella est ponctuée des choses qu'elle aime faire et qu'elle n'aime pas faire, et dont elle a dressé une liste. On peut en lire les dix premiers items au début du roman construit en sept parties qui correspondent aux sept jours de la semaine, parties divisées elles-mêmes en chapitres qui reprennent des goûts et dégoûts de Majella :
Majella commence son service en fin d'après-midi jusqu'à une heure du matin. Employée par "Mrs Connasse", elle voit passer les gens d'Aghybogey au comptoir, en compagnie de son collègue Marty avec qui elle couche quelquefois. La vie est morose, le quotidien respire la médiocrité et la saleté. Et, fait divers qui fait naître les commérages : la grand-mère de Majella vient de se faire assassiner dans sa caravane...
Le soir, inlassablement, elle se fait réchauffer au micro-ondes, rapporté du fast-food et offert par les patrons, son menu poisson-frites qu'elle avale au chaud sous sa couette. À force de se nourrir de hamburgers et de frites, elle est grosse, mais sans véritable complexe ; elle ne s'offusque pas souvent, en apparence. Les gens autour d'elle, elle les connaît depuis toujours : curieux, jaloux, malveillants ou désireux, pour les garçons, de coucher avec elle. Tout semble passer sur Majella : on suit de l'intérieur (point de vue interne 3e personne) un quotidien banal et difficile dont elle ne se plaint pas.
Dans son premier roman, Michelle Gallen nous donne à voir la vie d'une jeune fille pour qui l'horizon est bouché, prisonnière de sa condition sociale et de son environnement, dans un contexte de lutte entre Irlandais et "Rosbifs", de division entre catholiques et protestants. La structure est originale et permet de faire passer la pilule... parce que ce que mange et vit Majella est plus que gras et indigeste... Comme sur la couverture choisie par l'éditeur, son existence sent le graillon. Les détails que nous raconte l'auteur et le langage des personnages n'élèvent pas Majella, à laquelle on s'attache pourtant parce qu'on le sent victime de ce contexte contre lequel elle lutte en allant travailler, sans s'apitoyer sur son sort, mais auquel elle ne pourra sans doute pas échapper...
Or, lorsque "c'te grosse andouille", comme l'a appelée sa tante chez le notaire, hérite des terres de sa grand-mère, un espoir d'ailleurs s'ouvre à elle : les vendra-t-elle, partira-t-elle? Ou bien s'enterrera-t-elle pour toujours dans un microcosme étouffant, sans espoir d'épanouissement où elle risque de finir comme sa mère, ivre à longueur de temps et mourant à petit feu ?...
L'existence de Majella est ponctuée des choses qu'elle aime faire et qu'elle n'aime pas faire, et dont elle a dressé une liste. On peut en lire les dix premiers items au début du roman construit en sept parties qui correspondent aux sept jours de la semaine, parties divisées elles-mêmes en chapitres qui reprennent des goûts et dégoûts de Majella :
0h59
Liste des trucs bien
Objet 8. Nettoyer
9h45
Objet 17.1. Douleurs - Les maux de tête
18h42
Objet 1. Bavardages, commérages et autres conneries
Liste des trucs bien
Objet 8. Nettoyer
9h45
Objet 17.1. Douleurs - Les maux de tête
18h42
Objet 1. Bavardages, commérages et autres conneries
Majella commence son service en fin d'après-midi jusqu'à une heure du matin. Employée par "Mrs Connasse", elle voit passer les gens d'Aghybogey au comptoir, en compagnie de son collègue Marty avec qui elle couche quelquefois. La vie est morose, le quotidien respire la médiocrité et la saleté. Et, fait divers qui fait naître les commérages : la grand-mère de Majella vient de se faire assassiner dans sa caravane...
Le soir, inlassablement, elle se fait réchauffer au micro-ondes, rapporté du fast-food et offert par les patrons, son menu poisson-frites qu'elle avale au chaud sous sa couette. À force de se nourrir de hamburgers et de frites, elle est grosse, mais sans véritable complexe ; elle ne s'offusque pas souvent, en apparence. Les gens autour d'elle, elle les connaît depuis toujours : curieux, jaloux, malveillants ou désireux, pour les garçons, de coucher avec elle. Tout semble passer sur Majella : on suit de l'intérieur (point de vue interne 3e personne) un quotidien banal et difficile dont elle ne se plaint pas.
Dans son premier roman, Michelle Gallen nous donne à voir la vie d'une jeune fille pour qui l'horizon est bouché, prisonnière de sa condition sociale et de son environnement, dans un contexte de lutte entre Irlandais et "Rosbifs", de division entre catholiques et protestants. La structure est originale et permet de faire passer la pilule... parce que ce que mange et vit Majella est plus que gras et indigeste... Comme sur la couverture choisie par l'éditeur, son existence sent le graillon. Les détails que nous raconte l'auteur et le langage des personnages n'élèvent pas Majella, à laquelle on s'attache pourtant parce qu'on le sent victime de ce contexte contre lequel elle lutte en allant travailler, sans s'apitoyer sur son sort, mais auquel elle ne pourra sans doute pas échapper...
Or, lorsque "c'te grosse andouille", comme l'a appelée sa tante chez le notaire, hérite des terres de sa grand-mère, un espoir d'ailleurs s'ouvre à elle : les vendra-t-elle, partira-t-elle? Ou bien s'enterrera-t-elle pour toujours dans un microcosme étouffant, sans espoir d'épanouissement où elle risque de finir comme sa mère, ivre à longueur de temps et mourant à petit feu ?...
Céline Maltère
Joelle Losfeld éditions, 5 janvier 2023
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