À l'ombre d'un papillon de nuit, Ivar Schute (2023)

Ivar Schute est un archéologue spécialisé dans les camps  de concentration et centres d'extermination nazis. Dans À l'ombre d'un papillon de nuit, il explique les travaux qu'il a menés durant des dizaines d'années pour mettre au jour les lieux où les Juifs ont été déportés et exterminés. D'origine néerlandaise, il connaît particulièrement le sort qui a été réservé aux Juifs de cette nationalité et nous parle de camps moins connus du grand public, comme Westerbork aux Pays-Bas, camp par lequel a transité Anne Frank avant de mourir à Bergen-Belsen.
Son travail consiste donc à fouiller les camps pour faire revivre le passé et obtenir de nouvelles informations sur la Shoah. Quand il déterre des objets, ces objets parlent et racontent la vie d'individus. Ivar Schute a participé à la fouille qui a permis de faire apparaître les chambres à gaz à Sobibor.
Il explique les diverses difficultés qu'il rencontre dans ses recherches. Par exemple, il faut suivre la Halacha : la loi juive ne permet pas de déranger les morts dans leur sépulture (fût-elle un horrible charnier). Il faut donc creuser de minces puits, explorer avec précaution en respectant les règles données par les rabbins. Dans d'autres cas, le problème est le site lui-même, parfois transformé en musée et inexploitable. Il donne l'exemple de Bełżec, centre d'extermination (tous les Juifs qui y étaient transportés étaient voués directement à la mort), recouvert de nos jours de multiples cailloux symbolisant les morts. Le problème est que ce mémorial et ce dispositif empêchent toutes fouilles et fige Bełżec dans son passé dont on ne saura rien de plus.


Il consacre plusieurs chapitres à différents camps, s'attardant à la fin sur Sobibor, centre d'extermination sur lequel on a découvert beaucoup de choses ces vingt dernières années. Il explique les fouilles, ce tunnel mis au jour, tunnel construit par des Sonderkommandos (employé des chambres à gaz et des fours) qui ont tenté de s'enfuir mais ont été surpris et exterminés. Les objets parlent : Ivar Schute nous dit ainsi la vie de certains individus, comme le peintre Max Van Dam, utilisé un temps par les nazis pour leur faire des tableaux, puis tué comme les autres à l'âge de trente-trois ans, ou encore ce juif marocain, Messaoud Aknine, assassiné là-bas aussi. Les objets appartenant aux enfants serrent aussi le cœur.



L'histoire de Philip Bialowitz est celle d'un miraculé : il parvient à échapper aux balles des Einsatzgruppen en faisant le mort dans la fosse, puis il survit à Sobibor, placé au camp 1 avec son frère en tant que pharmaciens ; tabassé par le SS le plus sadique d'Auschwitz, Gustav Wagner, (il lui lance des seaux en fer tandis qu'il doit descendre dans un puits), il survit malgré tout.
Ivar Schute dit aussi qu'il doit se battre contre les négationnistes, dont l'un des plus célèbres est David Irving (voir le film Le Procès du siècle). Ses recherches sont une mission qu'il ne compte pas abandonner.

Récemment, Arte a diffusé Anatomie d'un camp d'extermination : Sobibor, où il est question de ces recherches. On y voit certains de ses collègues, dont l'Israélien Yoram Haimi :



"Ce que notre équipe a mis au jour : des possessions confisquées, la Himmelfahrstrasse, les contours des fosses communes et les fondations des chambres à gaz. L'album photos et les résultats des fouilles se complètent ainsi à la perfection. Là où l'album est mystificateur, l'archéologie a dépassé la mystification."

Ce document est publié par les éditions Globe.
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