Le Manoir des lettres
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Cézanne, Charles Juliet (2023) Empty Cézanne, Charles Juliet (2023)

Ven 9 Juin - 18:57
Cézanne, Charles Juliet (2023) 35239010


Le premier mot utilisé par Charles Juliet dans son texte "Un chercheur d'absolu", joint avec un autre texte "Un grand vivant" pour former un opuscule intitulé Cézanne, est combat. "Le combat que Cézanne va mener contre la peinture, contre l'incompréhension, commence très tôt". Ainsi Cézanne, dès le début, entre dans une lutte âpre qui ne va pas le lâcher de sitôt. C'est aussi ainsi qu'apparaît Charles Juliet dans ses écrits, dans son journal notamment. En lutte pour trouver sa vérité dans l'écriture, traquant le moindre mot, disséquant la moindre pensée, passant au filtre de la conscience chaque émotion. Il semblerait, à lire ce texte, que l'on écrive bien que sur ce que l'on connaît.
Le combat de Cézanne se met en place des l'enfance "lorsqu'il apprend à son père qu'il veut devenir peintre". La figure du père, imposante, se dresse, comme plus tard se dressera devant lui la montagne Sainte-Victoire. Pourtant, Cézanne semble posséder un fort caractère, pugnace, il ne cède en rien, "on peut s'étonner qu'à plus de quarante ans il ait vécu dans la crainte de son géniteur". Jusqu'à lui cacher qu'il vit avec la femme qu'il aime et le fils qu'il vient d'avoir avec cette dernière. C'est que Cézanne ne gagne pas sa vie, c'est son père qui l'entretient, lui allouant une somme modique tous les mois.
Peindre est difficile, vivre de sa peinture encore plus. Le combat est bien présent, et le sentiment de gêne omniprésent. Le regard porté sur lui par son entourage n'est guère encourageant. "Cézanne fait figure de parent pauvre. On l'accueille sans plaisir, par obligation". Zola, qui fut son ami d'enfance le dépeindra dans L'Œuvre comme un peintre raté, qui se suicide. Cézanne écrira "je suis comme mort, je suis un homme qui n'existe pas".
Pourtant Cézanne s'acharne, mu par une force incroyable qui étonne.
À travers la peinture, c'est son rapport au monde qui est questionné, ainsi que son rapport à lui-même. "Ce que j'essaie de traduire est mystérieux, s'enchevêtre aux racines de l'être, à la source impalpable des émotions".
L'émotion, la sensation, c'est de là que part Cézanne. Son seul indicateur. Le trait d'union entre le monde et lui. Interrogeant la sensation, c'est le monde qui se donne, et à force de creuser, le monde apparaît dans sa nudité.
C'est sur cet aspect qu'insiste Charles Juliet dans son autre texte "Un grand vivant", où il s'adresse directement à Cézanne, comme s'il lui écrivait une lettre. "(La sensation) est à l'origine de l'acte qui s'achève par la pose d'une touche sur la toile". Sentir, voir, accéder à "la clarté parfaite de la vue juste". Charles Juliet en parlant de Cézanne parle un peu de lui-même. Tous deux en chemin vers leur vérité, véritable ascèse, s'arqueboutent sur cette exigence de traduire au plus près l'être des choses. "Il vous fallait traverser les apparences, vous immiscer dans les choses, vous fondre en elles, vous identifier à elles".
Le chemin, à mesure que Cézanne vieillit, se fait moins sinueux. À force de rigueur et d'acharnement, Cézanne gagne en maîtrise, et le chemin s'allège, se simplifie, donnant l'impression que, outre la notoriété qui parachève le combat, la sagesse aussi s'invite, venant couronner une vie au service de la vérité.
CR

Charles Juliet , Cézanne, Editions POL , 8€
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