Mala et le chat de l'espoir, Mala Kacenberg (2022)

Le livre Mala et le chat de l'espoir se présente comme le témoignage d'une Juive, rescapée de la Shoah. Mala vit à Tarnogrod, un petit village polonais près de Lublin, avec ses parents, ses frères et ses sœurs. Ils mènent ensemble une existence heureuse et modeste. Mais le village est très vite transformé en un ghetto, qui sera liquidé le 1er novembre 1942. Par sa débrouillardise, Mala parvient à se sauver. Elle se réfugie dans les bois, essaie de ne jamais frapper deux fois à la même porte quand elle cherche de l'aide et de la nourriture et, par miracle, grâce à son courage surtout, elle échappe à la mort. Pourtant, elle croise régulièrement des SS, mais elle parvient à passer à travers les mailles du filet de la mort.
Ses cheveux blonds lui permettent de faire croire qu'elle est Polonaise et de cacher sa judéité. C'est ainsi qu'elle a l'idée d'intégrer un groupe de jeunes qui sont envoyés en Allemagne pour travailler. Non sans difficultés et confrontée encore une fois à des situations périlleuses, elle obtient de faux papiers.
Elle passe le reste de la guerre, jusqu'à la Libération, au service de deux restaurateurs allemands qui la traitent bien, essayant toujours tant bien que mal de cacher qu'elle est juive.

Ce témoignage nous montre bien  le déroulement des faits en Pologne, la cruauté des nazis envers les Juifs qu'ils voulaient tous anéantir. Mala raconte ce qu'elle a vu, l'assassinat de toute sa famille, l'inhumanité de l'occupant. Elle n'oublie pas de dire l'antisémitisme des Polonais, qui ont continué les persécutions contre les Juifs même après le 8 mai 1945, rendant presque impossible le retour de la population juive en Pologne.
(Lire sur ces faits le livre de Ionas Turkov, En Pologne, après la Libération ).
On aime aussi, car ce n'est pas toujours le cas, lire sous la plume de Mala des envies meurtrières et vengeresses contre les nazis.

Ce qui m'a gênée, c'est la mise en avant sur la couverture du chat "qui aurait sauvé Mala". Cela semble une accroche commerciale (qui a marché, la preuve), mais ce n'est pas le sujet du livre. Mala est accompagnée durant plus de six ans par ce chat, et ce n'est pas possible en temps de guerre (elle est amenée à fuir, à prendre des trains, à séjourner dans des endroits où l'on n'aurait pas accepté son chat). Elle oublie aussi souvent d'en parler puis, tout à coup, on le retrouve à côté d'elle. Les autres ne s'interrogent que très rarement sur sa présence...
Alors, j'ai pensé que cela ne pouvait être qu'une métaphore, même si ce n'est pas présenté comme cela par l'éditeur ni l'auteur : ce chat serait une présence , un ami imaginaire qui aurait aidé Mala à tenir face à l'horreur, chose entièrement compréhensible quand on pense qu'une fillette se retrouve privée de tous ceux qu'elle aime et qu'elle doit lutter pour sa survie. D'ailleurs, ce qui pourrait conforter cette hypothèse sont les dernières lignes du livre, où Mala revient sur la présence extraordinaire de ce chat, qu'elle avait appelé "Malach" '(ange-gardien en hébreu). Elle dit qu'elle ne comprend pas non plus ses apparitions et disparitions soudaines à des moments clefs, et qu'elle voit ce chat comme la présence divine de Hashem (à qui elle fait référence très souvent, pensant qu'il la protège).
Il est malgré tout dommage que ce ne soit pas présenté comme une métaphore, qu'aucun doute ne soit émis durant le récit sur la présence de ce chat (assez évaporé, d'ailleurs, et vraiment là comme un gardien, un personnage qui veille, très peu incarné) car ce témoignage très fort pourrait être mis en doute à cause de cette histoire de chat (une préface aurait fait l'affaire... mais on comprend au sous-titre que c'est un argument de vente : "Le témoignage d'une rescapée de l'Holocauste, sauvée grâce à son chat".)
On ne trouve absolument rien sur Mala Kacenberg (nom de jeune fille Szorer), à part qu'elle serait née en 1927 et morte en 2007. Dans le livre, elle ne cesse de dire son désir d'écrire et de témoigner. Ce témoignage aurait donc enfin été publié en 2022. L'éditeur (City éditions) ne fournit aucun texte explicatif, aucune préface, post-face, aucune contextualisation. Comment ce témoignage est-il arrivé entre les mains d'un éditeur ? Par qui ?

Pour ces raisons, je conserve des doutes sur l'authenticité de ce livre, bien que je ne remette nullement en question les faits qui y sont relatés, précis et en concordance parfaite avec l'Histoire.

CM