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L'homme qui n'aimait plus les chats, Isabelle Aupy Empty L'homme qui n'aimait plus les chats, Isabelle Aupy

Dim 5 Mar - 8:55
L'homme qui n'aimait plus les chats, Isabelle Aupy 32830210


Sur une île, non loin du continent, vivent des hommes épris de liberté. Parmi eux, la vieille institutrice, le gardien du phare, le poète-musicien... et partout, des chats de toutes sortes, qui vont et viennent, les "pantouflards", les "domestiqués", ceux "qui aiment bien se laisser caresser, les "pas faciles à apprivoiser".
Un jour, les chats disparaissent. Est-ce arrivé peu à peu, sans que personne ne s'en rende compte ? Quelqu'un est-il venu les enlever ? Voulant trouver des réponses, on envoie un jeune professeur sur le continent : il revient avec une femme de l'administration. Pour les réconforter, on propose aux habitants de leur redonner des chats. Mais ce qui est présenté par les gens du continent comme des chats, ce sont des chiens, des chiens qu'on attribue aux insulaires, leur reflet qu'ils doivent tenir en laisse. D'abord, ils disent que ce sont des chiens, pas des chats : on leur affirme qu'ils se trompent. Il faut croire à ce qu'on leur dit ; on leur promet qu'avec ces nouveaux chats, ils ne seront plus seuls, qu'ils pourront plus facilement se rencontrer... On leur dit aussi que cela répond à leurs besoins... Or, le narrateur, dans son langage naïf, explique qu'ils avaient déjà tout (le récit est fait de son point de vue). Il constate justement qu'avec leur chien au bout de la laisse, les habitants ne se regardent plus. Leur imposer des chiens qu'on fait passer pour des chats est une entrave à leur liberté. Malheureusement, peu résistent, hormis le gardien du phare et une petite troupe autour de lui.

Cette courte fable, écrite par Isabelle Aupy, raconte comment, sans qu'on se méfie, la liberté peut nous être retirée. Sur fond de dystopie (le livre est placé sous le signe de Farenheit 451 et de 1984), le lecteur voit les gens se plier assez vite aux nouvelles règles, prendre des chiens pour des chats. Il n'y a pas d'éclats, pas de violence, juste une métamorphose du mode de vie qui se fait subrepticement.
La transformation de la réalité par le langage contribue à changer les insulaires, qui pouvaient se targuer de vivre aussi libres que des chats. "Appeler un chat un chat", on connaît l'expression, et cela rappelle aussi le novlangue orwellien :

"Les esprits s'embrouillent facilement. C'est ce qui arrive quand on appelle un chien un chat. On embrouille, on change les idées des gens, on les empêche de savoir ce qu'ils aiment ou ce qu'ils pensent."

Il y a des airs de Rhinocéros (Ionesco) dans ces métamorphoses qui ont lieu sous le regard d'un "sans-chien", résistant plutôt passif aux injonctions du continent. Ne suffit-il pas, un jour, de lâcher la laisse de son chien pour changer les choses...?

L'homme qui n'aimait plus les chats donne matière à réflexion. D'abord paru en 2019 aux Éditions du Panseur, il a reçu le prix des Vendanges littéraires de Rivesaltes et sort en livre de poche chez Folio Gallimard.
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