Sans titre

(Fait partie des textes résiduels du cycle othilien)
22 juillet 2023

Sans titre




Ils disaient d’arracher les souches et de casser les branches
Couper les arbres morts, abattre les squelettes
Frapper les silhouettes qui se taisent
Troue l’olivier Le chèvrefeuille Incendie la glycine

— Mais elle n’a pas levé la hache
Par paresse À cause du soleil Ou de la lune qui ne crochète rien
Rien qu’un œil ouvert sur le vide
L’orage n’a pas sévi ni lancé d’arcs-en-ciel où accrocher ses vœux
Tout était morne et triste — et elle n’a pas saisi la hache
Pour mettre à terre les moribonds

Ils disaient Tu es la laideur La honte des jardins Toi, la risée d’un peuple :
On ne garde pas un arbre mort ! Cent fois tu replanteras le même !
La vie est longue, clavis clavem !

Elle a jeté la hache, s’est glissée sous l’arbre sans feuilles, a tendu ses doigts à la chèvre,
Si le bois mort grouillait de vie ?
Elle a lu le souvenir, l’absence et les ténèbres,
A espéré ces pages entre ses mains
Elle n’a pas chassé son image et l’a laissée revivre dans toutes celles qu’elle croisait,
Malgré le sourire mort Le temps qui se traîne Le silence,
A fait parler des inconnues pour les inflexions identiques, a embrassé les gestes similaires,
A joué les borgnes face à la mer,
Des airs de contre-muse,
Fidèle au monde inachevé,
Et s’est piquée à la mémoire d’été Août-toujours-une-promesse,
A chassé les désirs, les actes dérisoires
(Millième vie des poulpes affamés)

Ils disent C’est incongru (elle disait ça aussi ou même chacun sa vie), la régénération
Rien ne renaît jamais que dans les contes

Les congres s’amusent de leur écho ; ils crachent des bulles en H
Qui ferait le mal pour le mal ?
Tout repoussera. La sève palpite dans le tronc sec…
Elle est sûre qu’y chante un oiseau