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V, les ailes de Faucon Empty V, les ailes de Faucon

Jeu 13 Jan - 13:21
Ce texte a été écrit en 2015, en hommage à Violette Leduc, après un voyage en février de la même année dans le Vaucluse à Faucon, sur ses traces.

V, les ailes de Faucon Captur64
Illustration de Marion Dujardin




Un extrait de ce texte a été publié dans la revue québecoise Contre jour (numéro consacré à Violette Leduc, 2017) :



V, les ailes de Faucon 15894310V, les ailes de Faucon 16114710


Dernière édition par Le Manoir le Jeu 13 Avr - 9:55, édité 1 fois
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Jeu 13 Jan - 13:22
Le texte de Céline Maltère :

Céline Maltère
 
 
 
 
[size=33]V, les ailes de Faucon[/size]
 
 
 
 
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
« On aperçoit Faucon.
– Faucon comme l’oiseau ?
– Comme l’oiseau. »
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 


I. Le viaduc
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
     L’hiver me cloute, un corps étendu sur la route : un faux christique sur le goudron, un martyr ? À quoi bon. Sur la voie silencieuse, je cherche à oublier le mal qui m’accompagne, à abandonner comme un chien, loin des chemins de campagne, la gale, rongeuse d’un plomb qu’elle dispute aux cervelles. J’enfouis la gaieté qu’on ampute, la goutte qui s’est emparée d’elle quand je marchais entre Saône et Rhône, dans la cité chérie plus que les capitales.
     Lamenoire est une videuse d’entrailles. Elle opère avec des pincettes, en délicatesse, pour faire mal. Qui a tué l’intuition au lit chirurgical ? Je ninvente rien, je ne rêve pas.
     Je ne m’habitue pas aux rancœurs, je ne prends pas le pli de la morosité. M’imaginer la fin ? Non. Je ne prie pas le cafard, jalousie qui sinvite aux noces, qui surpeuple et qui contamine. Je joue le marionnettiste, le défibrillateur d’un cœur qui ne m’aime plus. « Rends-toi à l’évidence ! » Elle ne meurt pas de me revoir. Lamenoire a fait de moi un ruminant. Combien de syllabes au mot « résignation » ? Je ne vois pas le bout de lantépénultième. Impuissante, jhumilie ma poitrine. Pas de réconfort dans les rites : je tends encore la joue, les larmes, des réflexes. Le ressassement marche sur les eaux, regain de boue, prestige ! Quon se vante bientôt : il a multiplié les peines. Cest son arche, son étal. Lamenoire ne maime plus. Puis-je y faire quelque chose ? Grincer au fond des nuits, telle une chauve-souris ?
 
     Soudain, un pont me frappe l’âme. La frontière est franchie, nos projets sont de l’or, des pépites, des gougères, nos délices et génuflexions ! Le limes n’était pas tracé sur ma feuille de route, je ralentis, je traverse
 
 
LE VIADUC DE LA VIOLETTE.
 
    
     C’est l’effet d’un printemps qui dit son avenir à la glace ! Des mots secouent. Je fais le rêve d’un riche pour vivre dans le Vaucluse. Cinq-cent-soixante-quatre mètres qui passent comme un éclair, je ne me soucie plus des images. Ô nom qui s’apparente à elle de toutes les façons, telles ces fleurs qui poussèrent un matin, fin d’hiver. Nous allons t’honorer, piétiner la discorde. Lamenoire m’aimera de nouveau.
     Les idées noires sont des mouches sur le bitume : elles tombent, elles se collent au pare-brise, montrent leur face aux nuées sinistres. Devant moi, l’horizon sourit. Pourtant, la route est laide. L’horizon n’est plus terne. Un nom, seulement un nom pour recolorer le voyage : il brille déjà, il frappe comme une fanfare sur la voie désertique. Cinq-cent-soixante-quatre mètres, j’aurai passé les bornes en quelques minutes, levé l’amour du lit gluant, feu le désir qui reprend feu sur l’auréole. Follement, la tristesse s’envole. Là-bas, nous serons ensemble.


II. La tombe
 
 
     « J’écraserais mon passé sous la patte d’un sphinx si je le compliquais avec un vocabulaire
énigmatique. Mon passé n’est pas une énigme. »
 
Violette Leduc, La Chasse à l’amour
 
 
 
 
     De loin, nous apercevons le cimetière. Le soleil est entier et il châtie l’hiver. Prenons tout notre temps : une seule fois, nous verrons, et nous la chercherons parmi les autres tombes. Cest la première rencontre, le premier rendez-vous. Le coup daprès, nous saurons où aller, quil faut tourner à droite mais, pour linstant, dans l’ignorance, nous sommes les vierges d’outre-tombe, nous jouons les innocentes qui prendrons les mauvaises allées, qui errerons peut-être jusqu’au nouveau cimetière où elle ne peut gésir.
     Trois colonnes de cyprès entre les oliviers. Les vignes quadrillent l’humble nécropole. Ce carré minuscule abrite-t-il une grande âme? Nul ne meurt à Faucon. Enterrent-ils les défunts ? Est-ce une Thèbes, une terre maudite, les cadavres pourris au soleil ? Qu’en font-ils s’ils ne sont pas ici ? Nous percerons ce mystère.  
     Le cimetière est un trompe-l’œil. Il aurait pu être un jardin si deux croix ne laissaient aucun doute. Quelle mort discrète et silencieuse… C’est l’antithèse du père Lachaise. J’imagine les rivières de vin qui arroseront les morts durant l’été, l’ivresse des esprits qui se donnent rendez-vous au-delà des collines, et Violette de mauvaise humeur qui s’invite à la fête, se renfrogne et leur dit : « Voilà le monstre ! » Ces trois mots décidèrent de sa vie haut perchée, au village improbable qui lui ouvrait ses ailes, si bien monstre qu’elle fut relogée au fin fond des campagnes, dans un Vaucluse désert où l’on ne peut que boire, compter les mouches, nourrir les chats…
     La nuit, les pipistrelles se posent sur les branches, avalent quelques olives et chantent la complainte des mal-aimées. Un des cyprès bouffis nous induit en erreur : il attire le visiteur et voudrait lengouffrer. Laissez-nous rire, arbre sinistre dont les racines aiment nous chatouiller. Vous attendrez mon heure. Je suis là pour Violette.
     Aucun œil alentour, nous sommes seules. Pas de bigotes, aucun enterrement, même s’il est rare qu’on sacrifie la sieste pour une procession. Les morts ont tout leur temps.
 
     « La porte de leur cimetière est sobre. () Elle ressemble aux coffres-forts des vivants. »
 
 
 
 
 
     Devant le portail, l’avertissement nous donne envie de rire : il faudra respecter la volonté des morts. Le jaune colore nos lèvres ; nous ne savons pas encore que nul n’a exaucé ses désirs moribonds. Son testament est vain. Le faite de solitude sur un autre versant, quand les nerfs ne bougent plus. Une tombe pour les vivants, voilà à quoi chacun devrait songer. Personne d’autre que soi n’est plus zélé pour fleurir le marbre gris, qu’on nous fait payer cher, cette pierre qui se colore des taches de vieillesse, qui rappelle après l’heure que nous avons vécu, le pied déjà boueux dans le plus pur anonymat. Des marguerites, ces pétales bruns qui s’étendent sur le corps et contaminent le couvercle. Il faut pousser la porte, parsemée de traces de doigts : appartiennent-elles aux vivants ? Nous avons rendez-vous.
     Religieusement, je tiens le bouquet de violettes. Ce matin, elles étaient raidies par le gel. Je les ai toutes cueillies, aucune survivante au jardin de Lamenoire. Le printemps n’a plus rien. Au travail, la repousse ! Elles étaient là pour elle, dans la rareté de février qui n’est pas tendre avec les fleurs. Enrobons-les d’aluminium, le voyage ne les tuera pas : elles se sont réchauffées sous le soleil dOrange. Les ruines ont des vertus mystiques. Les violettes dressent la tête.
     Certains bravent le ciel pour venger une vie ordinaire. Tandis que nous marchons entre des croix d’orgueil qui salignent sur les montagnes, dans leur beauté funèbre dont la sève suce la matière grise, je me souviens, en les voyant, de ces insectes qui n’étaient pas littérature, quand je ramassais mon pigeon mort de froid : ces vers ne fréquentaient pas les pêches. Ils étaient si gros sous son crâne qui cherchait à se détacher, ils se cachaient, ils dévoraient. Je n’eus pas la force de les regarder : la mort était grasse comme une taupe. Je les ai imaginés sous moi, je les vois sous elle autrefois. Quarante ans ont passé, eux-mêmes ont disparu, mangés par d’autres choses, mais ils ne sont pas loin. S’il existe un mystère, c’est celui de leur génération. D’où sortent-les vers ? Qui les envoie ? Sécrétons-nous déjà en nous les ennemis de la dernière heure ? De la boue naissent les grenouilles ; du blé sengendrent les souris ; et les poètes exultent.
     Je ne peux m’empêcher de penser à elle qui a vécu la grande dévoration et qui gît désormais à l’état de squelette, elle qui écrivait, attelée à sa tâche régulière. Où cela l’a-t-elle menée ? À une tombe que nous ne trouvons pas, dans ce cimetière minuscule qui s’amuse à nous perdre. Je photographie une plaque, que l’époux ou l’enfant a gravée de ses mots de douleur. Gangue écarlate, bientôt éclate. Je ne veux pas perdre les miens, mais l’instant où j’arpente ces allées n’est pour moi qu’un sursis. Elle n’est pas Violette, je patiente ; elle est une chère épouse qui les a tous abandonnés, eux qui l’aimaient, la mère unique qu’on adore. « À quoi servent mes pleurs ? À quoi servent mes plaintes ? » Ils sont utiles comme le marteau pour enfoncer le clou, ils nous courbent, nous réduisent, et nous plions vers le néant.
 
     J’entends Lamenoire qui me dit :
     « Cest ici. »
     Ici ? C’est impossible. La tombe de Violette n’est pas cette pierre anonyme que n’ornent pas une plaque, pas une photographie. Ce serait un comble d’abandon. Je n’en crois pas mes yeux ; passons notre chemin, Violette gît ailleurs. Ce n’est pas elle, sous cette dalle sans nom, la hargne d’un temps qui mord. Je me désole, ne peux le croire. Lamenoire me dit encore :
     « Mais si, regarde, quelque chose est écrit. »
     Son nom ! Nous ne l’avions pas vu entre les taches grises du granit. Sa dorure est passée. Combien de meurtrissures pour une femme qui rêvait d’un tombeau ?
 
     « Je crois que maintenant, une idée ma prise, une folie. Je voudrais aller choisir ma tombe dans mon village à Faucon, installer ma photographie devant mon emplacement. Enfin, un petit tombeau, si je puis dire, le plus modeste possible et puis, je voudrais aller fleurir ma tombe les dimanches, ce qui est une dépense. »
 
     Modeste, sans doute, mais misérable ? Son visage est absent, le vide, l’absence d’une vie qu’on résume ; une croix sans contraste, qui se fond dans le gris banal d’une tombe indistincte ; des fleurs de porcelaine, du mauvais goût d’éternité, lorsque personne ne vient rafraîchir la dernière demeure. Oubliés, les dimanches ! Quelle tristesse… Quelle honte de laisser croupir le nom de Violette Leduc, coquette contre une face honnie ! Où sont tous ses amis, les noctambules, les invertis, l’Événement, les descendances ? Ils se pâment à l’ombre de sa gloire, d’avoir connu celle qu’ils délaissent encore, un nom sur leur carte de visite, dédain pour qui n’est pas célèbre. Même erreur, pleureuses de métier !
 
     « Familles, je ne vous hais pas. Je me suis retirée. »
 
     Qui assume la morosité du tombeau de Violette? Une fidèle, parfois, vient nettoyer son lit. Une rose, un faux bouquet, voilà ses ornements. Des visiteurs ont mis un cœur de pierre sur son ventre pour calmer ses ardeurs, de peur qu’elle ne sorte la nuit, ne vienne hanter toutes ses amours. À force de fixer la tombe, je déchiffre quelques mots :
 
VIOLETTE LEDUC
ÉCRIVAIN

1907 – 1972
 
     L’inscription suffirait si l’on pouvait la lire. Mais il me faut gratter, à l’aide d’un mouchoir, la saleté qui la rend anonyme. Le vase noir est vide. Violette meurt des solitudes, croupit d’une vie sans rien. Si elle était vivante, elle mettrait des fleurs sur sa tombe.
     La dalle fut-elle posée trop vite ? J’essaie de la soulever. Il est heureux que je n’aie pas de force. On croirait se pencher sur la tombe d’un vieux-né : aucune fioriture, nul hommage, des avis de souillons. Le cercle n’a pas une pièce pour parer sa dernière demeure, celle qu’elle avait souhaitée de son vivant, dont elle s’était enorgueillie, croyant peut-être qu’un prénom l’honorerait d’une offrande. Ils étaient si nombreux… Le vide absolu s’égosille, il crie « Jacques ! », il pleure « Simone » ou « Jean » : rien ne se passera plus. L’écrivain ne vaut rien. Personne n’est là pour le chérir. On le courtise s’il a du succès. La comédie ne dure pas, il suffit d’un arrêt du souffle, que cesse l’hypocrisie. Chère épouse adorée, tu fis bien de ne pas naître Leduc, de ne pas écrire de romans, de ne pas avoir son visage et de faire des enfants. Ils t’ont écrit une poésie, ils ont glorifié ta mémoire, ils t’ont aimée sincèrement. Ils n’étaient pas dans l’ombre de ta page, à guetter tes écrits, à chercher tes éclats. Posthumes, ils ont prouvé qu’ils t’ont aimée. Violette t’envie, seule au linceul.
     Nous nous asseyons sur sa tombe. Quel crime y aurait-il à vouloir se rapprocher d’elle ? Il faut lire quelque chose, même si la voix s’étrangle, à cause du soleil aveuglant perpétué au-delà du livre. Les mots ne cognent pas au marbre, ils s’infiltrent et elle les entend. Ce sont les siens, pas un éloge funèbre. Ici manque de cérémonie. Elle trouva, par bonheur, une perle dans le Vaucluse. Maintenant, le désespoir du paysage se ferme sur les pages. Le corps est mort, les mots font des sauts d’affamés pour retrouver la bouche qui les dit, la main qui les forma :
 
     « À quoi servent, à quoi serviront mes descriptions pour lesquelles le souci dexactitude m’épuise ? »
 
     Une question s’assomme sur les pierres du cimetière. En lisant les cyprès hautains, l’insouciance des oiseaux, délabrement de la chapelle, je me figure les os intacts : allongée sur le dos, elle sourit en buvant son texte, les bras en croix sur la poitrine, et elle s’amuse à faire la morte. Nous irons au XIXème siècle, déterrer les belles héroïnes sur qui veillent les corbeaux, les poètes et les fous. Ils ne font qu’un, dans leur costume de geai, et ils rient de ressusciter des femmes que nous ne rappellerons pas : cent cinquante ans que la magie nous abandonne. Une confrérie de sorcières pour la faire surgir de l’oubli…
 
     « J’écris pour qui ? »
 
     Pour qui n’a pas fleuri la tombe de Violette, stagnante et sans mémoire. Plus tard, Madame Mancip dira que je me trompe. Mais pour l’instant, je frotte les lettres dorées, le toc de son marbre. Lamenoire agence les porcelaines, trouve une place pour mon piteux bouquet. Nous restons là, nous avons lu, il n’y a plus rien à dire. Attendre encore, une manifestation, un phénomène étrange, sa réapparition ? Nous goûtons juste le silence qui fait jaillir la vanité humaine. Je revois Violette dans son réduit de la rue Paul-Bert, vouée à sa discipline, noircissant ses cahiers comme si elle était un bagnard, espérant la reconnaissance, adorant des chimères et écoutant des voix qu’en contrebas de Faucon nous ne pouvons plus entendre. Elles ont été enfouies à deux mètres sous terre, dans le cerveau d’un écrivain. Lubie ! Les morts sont schizophrènes ! Une foule paranoïaque s’amuse la nuit à tourmenter la masse des cadavres ordinaires, nés pour nourrir la terre… J’écris pour croire que je ne mourrai pas. Regarde cette tombe qui te gifle.
 
     Nous prîmes une photographie, surprîmes son aura. Ailleurs, nous la chercherons puisqu’il semble qu’en plein jour ne viennent pas les fantômes.
     Une caresse insolite. Je touche encore sa tombe.
     Nous montons au village.



Dernière édition par Le Manoir le Jeu 13 Jan - 13:23, édité 1 fois
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V, les ailes de Faucon Empty V, les ailes de Faucon

Jeu 13 Jan - 13:22
III. Le village
 
 
« J’étais terne, je me lave dans ton ciel. Faucon,
 ta sévérité menchante. »
 
Violette Leduc, La Chasse à l’amour
 
 
     Je veux un blason pour cette ville : « Dessine-moi un faucon ».
     Dans le village, on entre par effraction, mais il se laisse prendre en douceur, par le bas, languissant sous le charme d’hyménoptères sortis de leur hibernation. Les fleurs qui se réveillent les voient de leurs grands yeux : rien ne leur échappe, ils nous guettent ; ils prennent garde au printemps nouveau, gonflé dans ses bourgeons. Soudain, lhélicoptère effraie les mandibules. Je sens quelle nous regarde et quelle les affectionne. Elle samuse avec les abeilles.
     Au pied du village, rien ne bouge, pas une mouche sur le sentier pour nous montrer la route. J’imagine les anesthésies d’un été encore loin, la torpeur sous le soleil qui tape, les crevasses auxquelles on échappe à l’heure des méridiennes. Le vin coule dans le sol, il monte dans les ceps que nous avons tétés avant d’arriver là. Dans la plaine, nous nous sommes couchées, nous avons respiré l’odeur des embryons, du Rasteau et du Gigondas, humé encore la sueur des nymphes qu’on nous versa dans un domaine sans que l’humeur revêche d’un vieux viticulteur n’entame notre désir d’être ici. Pour parler, nous disons que nous allons à Faucon. Il se demande ce que nous avons à y faire, mais nous ne révélons rien, sinon le vin dans le crachoir. Quand nous nous éloignons, je dis à Lamenoire qu’il n’aurait pas compris, qu’il aurait ri si nous lui avions dit Violette. Elle n’aime pas qu’on se moque des gens simples, elle me pardonne, c’est un grand jour, et Faucon nous attend.
 
     Nous avons vu la tombe, c’est vu, c’est dit plus haut, et le cœur est fendu. Maintenant, arpentons, montons par cette rue pentue. Dans le virage, le puits dont parle Violette, le voici, entravé dans sa chemise de fou. Les vieilles pierres ont leurs hôpitaux. Pourtant, personne ne s’y serait jeté ; on prend des précautions de lâche, à l’époque qui sent la javel. On a tapissé le puits d’arrêtés communaux, d’annonces sans intérêt puisqu’elles ne sont pas matrimoniales. Aujourd’hui, elle ne dirait pas :
 
     « Jeus le coup de foudre pour le vieux puits. »
 
     Je veux voir avec ses yeux, comme la première fois. Rue du Serre, nous grimpons.
     « Meurti ! Meurti ! » Un cri dans la ruelle déserte. Qui va là, qui nous parle ? Un petit chien sautille, la rue ne sera pas un danger. Chétif et fier, il accourt sur la pente.
     Plus loin, son maître, un sud-américain, l’appelle : « Meurti !». Sa voix chante : lautre côté du Pacifique roule ses tonneaux dans la descente. Je m’attendais à voir des paysans chenus comme les pierres en camisole, et je rencontre un chihuahua sous le soleil d’un nouveau Mexique. Des questions nous brûlent les lèvres, mais nous ne disons rien. Sur la place, un grand restaurant portes closes… L’hiver dort. L’employée de mairie se barricade derrière les volets fades : elle ne veut pas qu’on la dérange. Quel silence. Meurti n’aboie même pas. Il gambade à l’heure de la sieste, sans réveiller personne.
En bas, une femme nous hèle et nous fait signe. Elle crie le nom du chien, secoue les bras. Je me retourne car elle doit s’adresser à quelqu’un derrière nous…
 
     Miracle de rencontrer Madame Mancip, tourbillon au monde assoupi ! Elle marche dans tous les sens ; elle interpelle le maître, elle caresse le chien, elle nous dit que c’est une chienne et qu’elle s’appelle Myrtille. Avec elle, nous sommes à Faucon. Madame Mancip passe son chemin, elle semble plus occupée que les ministres à la capitale. Faucon se nourrit de son énergie. Pendant un moment, je la suis, j’essaie de la retenir. Je veux savoir où est Violette. Je cours derrière Madame Mancip qui n’a pas remarqué qu’une touriste la poursuit. Elle se retourne et elle m’écoute enfin :
     « Savez-vous où se trouve la maison de Violette Leduc ? »
     La Violette ! Elle la connue, sa mère aussi. Elle avait dix-huit ans quand on la enterrée.
     « Quelle triste tombe », lui dis-je.
– Vous trouvez ? » répond-elle. Il faut l’écrire à la mairie.
– On ne voit pas son nom, nous avons dû gratter les dorures sales. 
– Avez-vous remarqué qui repose à côté d’elle ? »
     Lamenoire me regarde, nous avons vu et nous avons parlé de cette tombe plus triste que celle de Violette. Son marbre roux ne laissait apparaître aucun nom : nulle fleur, pas d’hommage, une tristesse au carré.
     « Tina Jolas ! Violette est enterrée à côté de Tina Jolas. »
     Face à notre silence, elle ajoute :
     « La femme de René Char. Deux célébrités au village ! »
     Je n’ai pas bien photographié sa tombe ; pas de Tina Jolas avant Madame Mancip. Du doigt, elle nous indique des arches ; elle nous dit que cette femme a vécu à Faucon et acheté la maison à côté de l’église. Nous allons de surprise en surprise…
     « Je vous indique », dit-elle avec sa voix chantante. Elle nous parle de sa mère, morte jeune, à cinquante et un ans, et qui a bien connu Violette. Elle l’appelle par son prénom.
     « Jai même un livre signé quelque part. Il faudrait que je le retrouve. »
Envie de posséder ce trésor.
Je la questionne : connaît-elle Thérèse Beaumont, la route de Jaux ? Elle est intarissable. Elle nous désigne un grand domaine plus bas, mille pistes pour la trouver. Mais la route de Jaux, cela ne lui dit rien. Son téléphone sonne. Elle interroge qui est au bout du fil et qui répond que c’est l’endroit où elle cueille les champignons.
     « Je sais où c’est, alors ! »
     Et elle explique comment nous rendre dans le bois de Jaux, un peu plus loin que le village :
     « Vous maurez appris quelque chose ! »
     Sans elle, le bourg serait désert. Elle disparaît comme un lézard entre ses murs qui se réchauffent déjà.


IV. La maison
 
 
     « Au temps des vieux murs j'étais
en communion avec les morts tranquilles de la maison. Quand ils étaient humides et lézardés, je sentais des âmes tout près, maintenant, je ne sens plus rien. »
 
Violette Leduc, La Chasse à l’amour
 
 
 
     Nous retardons l’approche, comme nous l’avons fait au cimetière. Ce sera encore une première fois. Faucon  n’aura vécu qu’une décennie. 1961 – 1972. Voici Faucon. À pas lents, l’église se rapproche. Pourquoi n’avons-nous pas songé à y entrer ? Nous repartirons même, ignorant le clocher.
     Les indications de Madame Mancip sont exactes. Nous ne cherchons pas les lieux. Sur la gauche, une ruelle de Moyen-âge, avant l’Impasse du Canton. On dirait un tarmac d’où nous allons prendre l’envol, un décor de théâtre aussi : deux pots de fleurs en lair, quon arrose par la pensée, donnent des cils à la montagne. Au loin, la neige sur les crêtes : les monts sont peints sur un rideau. Où est la maison de Violette ? Avançons. Maintenant, le réverbère ; un corset, morceau de tonnelle. Cette arche a eu son heure de gloire. Est-ce le tableau dun peintre provençal ? Les tuiles forment des créneaux. Qui viendra pour nous accueillir ? Nous éprouvons la même surprise quand nous dépassons la gouttière :
 
     « Je voyais la maison la plus sévère de Faucon ».
 
     Il est là. On n’aperçoit que sa silhouette, la queue dressée et le pas de danseuse. Il nous ouvre la voie, nous montre le chemin. « Bienvenue, nous vous attendions. » Cest un chat, hirsute et maladif, dont on ne distingue pas la couleur du pelage. Nous pensons à nos bêtes, à leur félin pouvoir dincarnation. Bastet a quelque chose à dire entre ces pierres, gîtes des lézards qui dorment encore un peu. Mais nous ne trouvons qu’à lui parler des rayons du soleil, ce qui ne suffit pas à faire une prière. Le chat est là, nous accompagne ; il patiente, nous observera tant que nous rôderons autour de la maison.
     D’abord, la plaque. Enfin quelque chose pour elle, qui la nomme, qui n’est pas caché ou rongé par le temps.
 
 
     La maison de Violette fait l’angle. Les volets sont fermés. Madame Mancip nous a dit qu’elle appartient maintenant à des Suisses. Ils ne doivent venir qu’en été. Nous aimerions voir au-delà des pierres, regarder l’intérieur, la cuisine, rencontrer quelques rats qui lui firent des frayeurs. Mais leur présence pulvérisa les solitudes.
     Nous ressemblons à des vautours : si nous pouvions manger la roche ! Rien ne nous est offert, convoquons l’imagination « Rue de la Crotte de Verre ». Il faut se figurer Violette ouvrant le volet qui hésite et s’apprête à tomber. Superstition, peur du délabrement : une maison qui seffrite, un sol qui ploie, une fenêtre qui s’échappe Misère de nos maisons, pauvres de nous, victimes des charpentes, de ces infiltrations que ne craignent pas les araignées. Le soleil colmate les plâtres qui s’effritent : à Faucon, je pourrais admettre la déchéance, lorsque le Mont Ventoux vante l’éternité. Lombre dun arbre sur le flanc… Les volets fermés sur la gauche, que je tente d’ébranler en vain… Nous allons sous la deuxième arche.
     Où était le jardin de Violette, celui où elle créait et pensait à revivre, loin du réduit de la rue Paul-Bert, des amours impossibles ? Une fâcheuse impression : tout a été refait ? Mais non ! Le balcon branle ! Sa rouille est un témoin du temps. Je crois soudain la voir accoudée, face à lhorizon de montagnes, éternuer, sentêter à cueillir les feuilles de tilleul. Jamais vu un tel paysage ! Une peinture agencée, rien dun collage surréaliste, Breton à ses carrières ! Violette a son panorama : des collines, des champs, des vignes, des toits rouges, des fermes, des forêts, des bourgeons, des lauriers, l’absence des villes et des poubelles. Les neiges éternelles.
     Le chat est là, dans sa robe tricolore. Il nous observe, assises sur le muret, dans le recueillement, au-dessus des montagnes. Cette fois, nous en sommes sûres : lanimal na rien à faire là, il est l’âme de Violette, celle que pique le diable pour ne pas avoir nourri les chats de la voisine, pour avoir laissé les arêtes et mangé la chair des sardines. Elle s’incarne dans un animal qui traîne éternellement autour de la maison, guettant le retour de propriétaires qu’il s’efforcera de hanter. Son regard est le sien, pas très avenant avec les visiteurs.
     Nous cherchons d’autres points de vue : le Ventoux sous le cadre dune arche encore plus grande. Qui est maître de ce belvédère ? La table en pierre, un champignon du pays d’oc, ombragé par un olivier. Quelqu’un a pendu des guirlandes.
 
 
     Le chat flegmatique nous regarde encore. Pourquoi restons-nous là ? Posté à langle de la rue, il veut nous faire comprendre quil est temps de partir. Nous faisons un pas, il avance, nous montre le chemin. Cette fois, il atteint la gouttière. L’arche, de face, se glorifie d’un clocher. La porte de la maison est vitrée, il suffirait de briser les fenêtres. Nous ne sommes pas des vandales. Le chat attend, il ne miaule pas. Nous oublions encore de visiter l’église. Je touche le mur, les pierres qui l’abritèrent. Le chat court et nous abandonne quand la maison est derrière nous. Il se volatilise. Il est trois heures et quart. Ce n’est pas une superstition.


                   V. Les bois de Jaux
 
 
     « Jaux. Je me suis attachée tout de suite au nom. () Nous sommes sur la route de Jaux madame Violette. C’était un chemin malaisé, montant, sablonneux, pierreux. Trois pas dans le sable, un sur les pierres,
et je marrachais du village. »
 
Violette Leduc, La Chasse à l’amour
 
 
     Elle partait, du matin, avec son attirail. Une tortue sur la route, sa maison sur le dos. Nous n’irons pas à pied, c’est à des kilomètres. Madame Mancip nous a montré la route : après la maison de Raphaël, il faut prendre un sentier sur la droite qui conduit dans les bois. Nous ne sommes pas sûres de trouver les lieux exacts, les champs sont vastes et les arbres nous entourent. Le chemin longe les champs : qui quadrille le pays, avec des dons dartiste ? Le vin a besoin dordre : il pousse sur des avenues. Lenvie nous prend de nous élancer des stalles à l’ombre, et de courir vers les montagnes qui forment l’horizon. Faucon au loin encore, et son nid en hauteur, qui, par la perspective, est une molaire dans les vignes.
     Nous cherchions un calvaire et nous y renonçons. Je repense trop tard à la statue de la vierge sous laquelle elle écrit parfois.
     Nous arrivons à une clairière. Des panneaux de bois nous indiquent plusieurs directions. Nous ne nous sommes pas trompées ! Lun flèche le « bois de Jau », un Jau sans x, mais c’est celui de Violette. Errons, marchons, cherchons sa trace. Nous devons retrouver, cette épingle dans la paille, l’endroit qu’elle élisait. Pas un promeneur, personne : au cimetière et au village, nous fûmes moins seules au monde. Chemin des noces qui nous rapprochent : Lamenoire et moi communions. Jai oublié la route, nous nous sommes retrouvées. Notre boussole sera le mont Ventoux, à travers les hauts pins dont jignore lespèce. Des taupes, comme la mort au cimetière ! Le silence et linspiration ont leur abri dans la forêt, leurs monticules de terre sont la preuve qu’ils nichent ici. Plus nous marchons, plus le bois se fait obscène : il accueillit celle qui voyait des clitoris dans les fleurs de Séraphine. Un sexe de femme sur l’écorce retient notre regard ; par les feuilles mortes du chêne, il nous invite à lapprocher. Rien ne nous retient, nous sommes sur nos terres.
 
     Mais nous ne trouvons rien qui indique que Violette était là. Déçues, nous voulons redescendre. L’hiver nous brûle comme un traître ; la fatigue de penser à elle a eu raison de moi. Jai envie de rentrer. Limprégnation me pèse.
     Lamenoire marche devant moi, elle me distance. Sans elle, je n’aurais jamais découvert le repaire de Violette ! Lorsque je la rejoins, elle est assise à cet endroit qui nous semble sacré. Nous sommes persuadées qu’elle s’arrêtait ici pour suspendre son sac aux branches. Devant, vue sur le mont Ventoux, sa neige, sa rondeur bienveillante ! Regarde ! Elle sasseyait sur ce tronc, le dos droit contre un arbre, elle écrivait sur ses genoux. Elle se mettait en maillot de bain, laissait passer un sein, celui qui pourrit sous la terre ; exhibitionniste des bois, le loup du Mont Ventoux riait seul. Là encore, il faut lire, comme nous lavons fait sur sa tombe. Ce bois nous y invite, je choisis une page érotique. René déflore Violette, vierge vieille qu’honore un maçon plus puissant qu’un marteau-piqueur. Non, ne chuchotons pas : la sève est endormie depuis sa mort, on a peint des croix vertes. Abattront-ils ses arbres ? Jai ouvert le livre au hasard. Malgré moi, je baisse la voix :
 
     « Je suis étroite et tortueuse, cette idée meffleura. () Je vais au sacrifice. »
 
 
     La pudeur se déploie dans la forêt, pas sur les places publiques. Longtemps encore, nous fixons le Ventoux entre les arbres. Deux êtres se gavent d’une absence dans les bois de Jaux.
 
     Nous redescendons. Direction Vaison-la-Romaine ? Tout est passé trop vite. Les luxons sont les particules de notre pèlerinage. Demain, le vide ; dans quelques heures, ce ne sera qu’un rêve.
     Ceux qui ne savent pas mourir deviennent les grands voleurs ! Nous restons devant le panneau qui indique que le « Bois de Jau » est à droite. Nous manquons de lemporter avec nous, pour créer lillusion chez soi d’être encore à Faucon. Finalement, nous partons, lentement, savourant le sentier désertique. Personne sur le chemin. Aucun intrus, pas un pervers au fond de la forêt pour gâcher le plaisir. Rien n’a scié l’harmonie. Encore une halte devant les vignes. Je me ferais arracheur de dents devant ce paysage et, plus qu’une pancarte, j’emporterais, dans un écrin, le village-molaire.


VI. Le retour impossible
 
 
« Route de Jaux.
Fidélité.
Je reconnais, dix ans après, certains cailloux
sous l’auvent des rochers. »
 
Violette Leduc, La Chasse à l’amour
 
 
Instincts de larrons qui s’épuisent. La même pancarte qu’à l’arrivée se retrouve dans mon dos. Faisons face, revenons en arrière ! Qui voudrait la quitter si vite ? Je ne serai pas là de sitôt.
     « Nous trouverons des prétextes, mon amour. »
     Photographies sous tous les angles… Nous braconnons la plaine et ses hauteurs bien que le moteur nous tire dans l’autre sens. Faucon contre Vaison. Je me console, mais c’est encore plus triste ! Vaison fut lhôpital, le cancer, dégradation quon ne veut pas voir. Nous mangerons ce soir dans les parages, comme des charognards.
     Soudain, l’obligation de retourner en arrière. Dans les ruines de Vaison, je dis à Lamenoire :
     « Jai perdu mon bonnet ! »
     Affolement général, roulement de tambours, armée en marche : retournons à Faucon ! La centurie en branle pour un bonnet ! Nous irons sur les bords de routes, dans la forêt et nous remonterons au village, si nécessaire. Tu parlais de prétextes Comment jurer que ce nen est pas un, en l’instant où le souffle se retient pour retrouver le pauvre couvre-chef ? Il fait froid, je ne supporterai pas d’avoir perdu cette laine. Il nous faut des excuses ! Le fantôme de Violette a volé mon bonnet ! Le bois est tout puissant, il nous ravit, dun appel dair irrésistible.
     Lentement, nous rebroussons chemin, nous faisons la route à rebours, guettant le bonnet couleur de terre, dans les fossés, une aiguille perdue dans les vignes. Sur des kilomètres, nous cherchons et je m’apitoie. Mais au fond, je suis heureuse que Violette ait trouvé une idée pour nous ramener à elle. Une force veut notre présence, nous n’avons pas dit au revoir.
     Rien sur les bords de routes. Au loin, Faucon, le nid, la molaire aguicheuse… « Sil le faut, nous y retournerons. » Patience de Lamenoire…
     Nous refaisons le même parcours : les vignes, le sentier qui monte, la clairière, le panneau qui n’est pas volé. Sans Lamenoire, je serais perdue. Elle m’a conduite dans les bois, je l’ai suivie à l’aveugle, les virages m’inquiétaient et ne me disaient rien.
     « Nous sommes passées par là ? »
     Décidément, je n’ai pas de mémoire. Elle pourrait bien m’abandonner ici, j’y mourrais sans débrouillardise.


 
 
     J’arpente, je me désole. Un objet nous retient, un bonnet sans valeur, marron comme les champs secs, qui a pu tomber n’importe où. Nous marchons, je suis Lamenoire, je scrute les cailloux, faisant de l’œil à l’âme de Violette… Quelle chasse au trésor ! Je me désole encore, je menfonce dans un remblai, je maltraite une fougère. Lamenoire est montée, cest fichu, retournons. La tête basse, je me plains encore. J’ai perdu une gemme ; ma fortune est morte dans ces bois.
     « Dis-toi que Violette la volé ! »
     L’idée ne me console pas. Elle s’amuse avec moi. La descente sablonneuse se délecte de regrets.
     Lamenoire me prend dans ses bras et m’embrasse. Elle m’enfonce le bonnet sur la tête :
     « Je lai retrouvé en haut, quand tu piétinais les fougères. Au milieu du chemin. »
     Le bonheur revenu ! En moffrant un diamant, elle ne meût pas ravie davantage. Elles se sont entendues pour me jouer ce tour-là. Cette fois, nous disons au revoir à Violette, nous ne fuyons pas comme des voleuses, nos instincts sont calmés. J’ai enfoui les idées noires qui me poursuivaient sur le bitume : hier, comme ce temps est loin ! Le voyage nous a réunies. Son souvenir est un élixir.
     Regardons encore le clocher. Quelque chose nous a retenues, qui nous laisse partir. La ligue des oliviers et des cyprès, le vin qui enivre trop vite…
 
     « Un papillon mauve se posa sur les mauves. »
 
     Des mauves et des violettes pour celui qui meurt à la nuit. Maintenant, il s’envole, Faucon est derrière nous.
     Le 19 février s’achève, nous nous éloignons d’elle : tenons bon pour ne pas finir comme des statues de sel.
 
 
 
17 février – 22 mars 2015
 
 
 
 


 
 
 
 
 
 
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En complément, Invitation au voyage (Arte) du 11 janvier 2022, sur Violette et Faucon.

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